Mamane Sani – La première fois je quitte mon pays
La première fois je quitte mon pays était pour aller en France. Un grand saut pour quelqu’un, anthropologue de surcroit qui marche pour la première fois au-delà des frontières de son pays. C’était le premier d’une succession de séjours alternés entre ce beau pays et mes terres d’origine. Depuis, la ville de Lyon où je poursuis mes études à l’Ecole Normale Supérieure est devenue une terre d’accueil. Grace aux nouvelles technologies d’information et de communication, mes parents, amis et proches sont régulièrement informés de mes activités quotidiennes, de mes déplacements aussi bien à Lyon que dans certaines villes de l’hexagone. Très facilement je me suis fait des amis le jour même de mon arrivée en me joignant à une fête organisée par mes colocataires qui par la suite, m’ont fait découvrir l’université et la métropole lyonnaise. Mis à part la lecture qui prend plus de la moitié de mon temps, je me promène régulièrement dans la ville avec les amis : deux Italiennes, un israélien, un français et une chinoise. Une grande diversité qui fait la différence et qui a déconstruit mes jugements avant de venir car je croyais que j’aurais du mal à me faire accepter par les autres en tant que Noir et Africain. Je m’étais trompé car ensemble, on fait souvent la cuisine ou alors le food sharing (chacun amène son repas). On réserve ensemble aussi les places pour le théâtre du Kantor au sein de l’ENS et à longueur des nuits, on échange sur des sujets de politique, de religions, de nos croyances respectives, de nos privées etc.
Par ailleurs, le Rhône, ce magnifique fleuve qui coupe la ville de Lyon en deux et dont les rivages sont bien aménagées est l’endroit que je visite le plus à chaque fois que je suis à Lyon où les promenades occupent une bonne partie de mon temps. J’adore aussi la gastronomie française et surtout les fromages. C’est pourquoi j’ai toujours été régulier au restaurant universitaire et les autres de la ville. Je voyage aussi régulièrement à Paris et à Marseille pour participer à des séminaires ou faire des présentations. J’en profite pour découvrir les symboles de ces villes comme le vieux port ou l’opéra de Marseille, les arènes de Nîmes, la place Trocadéro, l’emblématique tour Eiffel et surtout la seine où je me promène régulièrement. Grâce à Fréderic Lemarcis mon directeur de thèse, qui habite à La-tour-du-pin, un village situé à 40 km au sud de Lyon, j’ai réellement découvert la vie en campagne. Je passe régulièrement des week-ends chez lui. Avec sa femme et ses deux enfants très accueillants, nous partons au marché des autres villages environnants faire le shoping ou aller en montagnes me faire découvrir les merveilles de la nature. Comme des guides touristiques, ils sont toujours disponibles pour répondre à mes questions parfois tordues sur le French way of life. A chaque fois que je visite la famille, la femme de mon directeur prépare pour moi de la tarte à la pomme ou à la fraise que je mange beaucoup et emporte à l’ENS. C’est très délicieux.
Par ailleurs, grâce au financement de la fondation suisse Oumou Dilly, j’obtiens un troisième séjour en France qui me conduit par la suite à Genève où j’ai fait deux passages dans le cadre de ma thèse. Je me sentais triste, très triste de m’apprendre que les étrangers en court séjour n’ont pas accès à la cité universitaire de l’ENS. J’ai donc cherché une autre cité un peu éloignée de l’ENS avec l’aide d’une amie qui est en postdoc. Par la suite, j’ai pris l’habitude de me rendre régulièrement à pied ou au métro à l’ENS. Ça m’a aussi fait du bien de changer un peu d’air avec la nouvelle habitation même si j’avais moins de Fréquentations pour des raisons organisationnelles. C’est le début de la rédaction de la thèse, de l’isolement total.
Petite ville, très calme avec les jardins et des places publiques bien aménagés pour un cadre de vie qualitativement et agréablement meilleur, Genève est une exception. Pendant mon premier séjour qui a duré trois jours, j’ai été chaleureusement accueilli par une collègue de mon directeur de thèse. Elle est anthropologue et enseigne à l’université de Genève. Je partais pour mener des entretiens au bureau du centre opérationnel de Genève de MSF, à l’OMS et à GAVI. Mon agenda était très serré et je n’ai pas pu avoir assez de temps pour mieux découvrir la ville e ses merveilles. Il a fallu par la suite un deuxième passage où j’ai participé un séminaire doctoral avec une présentation pour que je découvre et je visite le jet d’eau, une œuvre phénoménale où s’affluent les touristes pour contempler le monument et prendre les photos. Je suis à nouveau logé au Carouge comme l’autre fois, un quartier à la périphérie de la ville où j’ai fait le vélo jusqu’à l’UNIV. Ce qui m’a réellement fait du bien. J’ai toujours adoré la marche. C’est pourquoi, de la gare de Genève à au siège de Gavi, je parcours le chemin à pied en passant par le rue de Lausanne puis celle de la France avec toujours un arrêt pour manger du Kebab et voir un peu. Mais c’est plus qu’en France. Dans chacune des villes que je visite, je m’arrange toujours pour avoir une connaissance pour m’aider découvrir. Ma famille d’accueil et une Genevoise que j’ai connue à l’ENS grâce à mon directeur auprès de qui elle faisait son postdoc m’accueil toujours et m’invite dans un restaurant de Genève ou j’ai une fois assisté à un concert de musique.